45ème Réunion consultative des Parties contractantes à la Convention de Londres et 18ème Réunion des Parties contractantes au Protocole de Londres (LC 45/LP 18)

Géo-ingénierie marine - Déclaration

Les Parties aux instruments qui réglementent l'immersion de déchets en mer ont réitéré, dans une déclaration, leur inquiétude concernant les techniques de géo-ingénierie marine, qui peuvent avoir des effets délétères étendus, durables ou graves. Elles affirment que ces activités de géo-ingénierie marine, autres que la recherche scientifique légitime, devraient être différées.

La déclaration a été adoptée à la quarante-cinquième Réunion consultative des Parties contractantes à la Convention de Londres et à la dix-huitième Réunion des Parties contractantes au Protocole de Londres (LC 45/LP 18), qui se sont réunies au Siège de l'Organisation maritime internationale (OMI) du 2 au 6 octobre 2023.

La déclaration stipule que :

  • chacune des quatre techniques de géo-ingénierie marine à évaluer en priorité peuvent avoir des effets délétères étendus, durables ou graves ; et

  • il existe une grande incertitude quant à leurs effets sur le milieu marin,  la santé humaine et les autres utilisations de l'océan.

Les organes directeurs de la Convention et du Protocole de Londres rappellent l'urgence des travaux relatifs à l'évaluation des techniques de géo-ingénierie marine, compte tenu de l'intérêt croissant pour les techniques de géo-ingénierie marine et du nombre et de la diversité des projets de géo-ingénierie marine qui ont été menés, sont en cours ou sont prévus à l'avenir et qui, dans certains cas, sont motivés par des intérêts commerciaux.

En outre, les organes directeurs estiment que ces techniques risquent d'avoir des effets néfastes sur l'environnement, que leur efficacité est mal connue. Les activités autres que la recherche scientifique légitime devraient être différées.

Les techniques de géo-ingénierie marine comprennent à la fois l'élimination du dioxyde de carbone marin et la gestion du rayonnement solaire. Les quatre techniques qui sont ou ont été évaluées sont l'amélioration de l'alcalinité des océans; la culture de la biomasse aux fins de l'élimination du carbone; l'éclaircissement des nuages marins; et l'amélioration de la surface de l'albédo faisant intervenir des particules réfléchissantes et/ou d'autres matières. Les travaux sur cette question ont été menés par les organes directeurs de la Convention de Londres et du Protocole de Londres et par les Groupes scientifiques de la Convention de Londres et du Protocole de Londres.

Le texte intégral de la déclaration est reproduit ci-dessous.

Rappel des faits

En 2008, les Parties à la Convention de Londres et au Protocole de Londres ont adopté une résolution (LC-LP.1 (2008)), qui stipule que les activités de fertilisation des océans relèvent de la Convention de Londres et du Protocole de Londres et que les activités de fertilisation des océans autres que la recherche scientifique légitime ne devraient pas être autorisées.

Une autre résolution (LC-LP.2 (2010)) sur le "Cadre pour l'évaluation des recherches scientifiques impliquant la fertilisation des océans", selon laquelle les projets de recherche proposés devraient être évalués afin de déterminer s'ils peuvent être considérés comme une recherche scientifique légitime.

Ensemble, ces résolutions s'appliquent à toutes les Parties contractantes de la Convention de Londres et continuent de s'appliquer aux Parties contractantes du Protocole de Londres, en attendant l'entrée en vigueur de l'amendement de 2013 au Protocole de Londres. Une fois entré en vigueur, l'amendement de 2013 créera un régime juridiquement contraignant offrant un mécanisme de réglementation et de contrôle de la géo-ingénierie marine fondé sur des données scientifiques, mondial, transparent et efficace. L'amendement permet de réglementer à l'avenir les techniques de géo-ingénierie marine qui entrent dans le champ d'application du Protocole de Londres et qui sont susceptibles d'avoir des incidences étendues, durables ou graves sur le milieu marin.

Les amendements de 2013 ont reçu à ce jour six instruments d'acceptation, qui avaient été déposés par le Royaume-Uni, la Finlande, les Pays-Bas, la Norvège, l'Estonie et l'Allemagne. Pour entrer en vigueur, les amendements doivent être acceptés par les deux tiers des Parties contractantes.

Un rapport de 2019 publié par le Groupe mixte d'experts chargé d'étudier les aspects scientifiques de la protection de l'environnement marin (GESAMP) donne un aperçu d'une gamme plus large de techniques de géo-ingénierie marine. Plus d'informations ici.

En savoir plus sur la Convention de Londres et le Protocole de Londres et les changements climatiques.

Les organes directeurs dont approuvé une demande adressée à toutes les Parties contractantes pour identifier les spécialistes potentiels sur les différents types de techniques de géo-ingénierie marine qui pourraient être suggérés aux fins de leur inscription dans une liste de spécialistes en géo-ingénierie marine.

Groupe de travail par correspondance intersessions sur les questions juridiques

Le Groupe de travail par correspondance intersessions sur les questions juridiques a été constitué de nouveau afin d'examiner les mesures à prendre concernant l'application provisoire de l'amendement de 2013 avant son entrée en vigueur ; poursuivre une analyse juridique (de la réglementation actuelle de géo-ingénierie marine dans le cadre de la Convention de Londres et du Protocole de Londres) ; poursuivre l'élaboration de textes en vue de l'inscription éventuelle de nouvelles techniques dans l'annexe du Protocole de Londres ; recenser et prendre les mesures permettant de sensibiliser aux travaux sur la géo-ingénierie marine dans le cadre de la Convention et du Protocole de Londres ; examiner la constitution d'une liste de spécialistes en géo-ingénierie marine.  Les organes directeurs ont confirmé que le Groupe de travail par correspondance intersessions sur les questions juridiques devrait continuer de fonder ses travaux sur l'hypothèse selon laquelle, en ce qui concernait les quatre techniques de géo-ingénierie marine à l'étude, il ne devrait être envisagé d'ajouter à la liste figurant à l'Annexe 4 du Protocole de Londres que les travaux de recherche scientifique légitime, compte tenu de l'état des connaissances actuelles.

Groupe de travail du GESAMP sur les moyens d'intervenir dans les océans pour atténuer le changement climatique

Les Réunions ont noté que le Groupe de travail 41 du Groupe mixte d'experts chargé d'étudier les aspects scientifiques de la protection de l'environnement marin (GESAMP) sur les moyens d'intervenir dans les océans pour atténuer le changement climatique concentre actuellement ses travaux sur l'élaboration d'un cadre d'évaluation intégrée. Ce cadre devrait constituer un guide comportant différents niveaux d'abstraction/de complexité concernant la manière de réaliser une évaluation globale propre à un contexte et à une intervention afin d'éclairer le processus de prise de décision au cas par cas.

Directives révisées sur l'enlèvement des revêtements antisalissure des navires

Les Réunions ont approuvé les Directives révisées sur les meilleures pratiques de gestion pour l'enlèvement des revêtements antisalissure des navires. Ces directives mettent à jour les directives précédentes (LC-P.1/Circ.31/Rev.1). Les nouveaux ajouts comprennent une référence aux nouvelles mesures de contrôle sur la cybutryne, en vertu des amendements apportés à la Convention sur les systèmes antisalissure qui sont entrés en vigueur le 1er janvier 2023 ; et aux Directives pour le contrôle et la gestion de l'encrassement biologique des navires en vue de réduire au minimum le transfert d'espèces aquatiques envahissantes (résolution MEPC.207(62) et révisée par le MEPC 80) et les Recommandations pour réduire au minimum le transfert d'espèces aquatiques envahissantes par le biais de l'encrassement biologique (salissures de la coque) dans le cas des embarcations de plaisance (MEPC.1/Circ.792) en 2012.

Séquestration du CO2 dans les formations géologiques du sous-sol marin

Le captage du carbone et de sa séquestration dans les formations géologiques du sous-sol marin sont réglementés par les amendements adoptés en 2009 à l'Annexe 1 du Protocole de Londres. Ces amendements ont créé une base juridique dans le droit international de l'environnement pour réglementer le captage et le stockage du carbone dans le sous-sol marin pour une isolation permanente. Cette pratique s'applique généralement aux grandes sources ponctuelles d'émissions de CO2, notamment les centrales électriques et les cimenteries, mais exclut l'utilisation de ces flux de déchets de CO2 pour la récupération assistée de pétrole.

L'amendement entrera en vigueur 60 jours après que les deux tiers des Parties contractantes auront déposé un instrument d'acceptation auprès de l'Organisation.

Les Réunions ont noté qu'à ce jour, dix États avaient déposé un instrument d'acceptation de l'amendement de 2009 à l'article 6 du Protocole de Londres, à savoir la Norvège (juillet 2011), le Royaume-Uni (novembre 2011), les Pays-Bas (novembre 2014), la République islamique d'Iran (novembre 2016), la Finlande (octobre 2017), l'Estonie (février 2019), la Suède (juillet 2020), le Danemark (janvier 2022), la République de Corée (avril 2022) et la Belgique (septembre 2022).

Depuis l'adoption en 2019, de la résolution LP.5(14), qui autorisait l'application à titre provisoire de l'amendement de 2009 à l'article 6 du Protocole de Londres, sept États avaient déposé une déclaration notifiant son application provisoire à l'amendement de 2009 (Belgique, Danemark, Norvège, Pays-Bas, République de Corée, Royaume-Uni et Suède).

Les Réunions ont noté également qu'en 2022, les Gouvernements de la Belgique et du Danemark avaient notifié à l'OMI le premier accord bilatéral au monde sur l'exportation de CO2, en vertu de l'amendement de 2009.

Les Réunions ont entériné la décision des Groupes scientifiques relative à la constitution d'un groupe de travail par correspondance sur l'expérience acquise de l'application des Directives pour l'évaluation des flux de dioxyde de carbone, et encouragé les Parties contractantes à échanger des renseignements pertinents et actualisés sur tous les aspects scientifiques, techniques et juridiques des projets de séquestration du CO2 en soumettant des documents à la prochaine session conjointe des Groupes scientifiques, en 2024.

Élimination des navires en plastique renforcé de fibres

Les Réunions ont pris note des travaux en cours au sein des Groupes scientifiques concernant l'élaboration de recommandations sur l'élimination des navires en fibre de verre, y compris l'invitation des Groupes aux organes directeurs de continuer à collaborer avec le PNUE et d'autres organismes compétents pour qu'ils élaborent une stratégie visant à encourager les fabricants de navires en plastique renforcé de fibres en particulier, et, le cas échéant, d'autres acteurs de l'industrie des composites, à mettre au point des mécanismes et procédures en vue d'une gestion sûre et respectueuse de l'environnement de ces matériaux en fin de vie, en mettant l'accent sur le recyclage/la réutilisation. Les Groupes scientifiques ont décidé que les navires en plastique renforcé de fibres ne devraient pas être éliminés en mer, sauf dans les cas, limités aux PEID, où il n'y avait pas d'autre solution d'élimination et/ou lorsqu'il s'agissait de la meilleure solution compte tenu des techniques actuelles, et seulement comme solution de dernier recours, et qu'elle devrait s'accompagner d'une documentation justifiant la décision et tenant compte de toutes les autres solutions possibles de gestion des navires en plastique renforcé de fibres en fin de vie. Il fallait en outre souligner que cette solution, même pour les PIED, ne devrait être considérée que comme une option provisoire jusqu'à ce qu'une solution plus durable soit trouvée et que des recommandations connexes soient élaborées.

Les Groupes scientifiques ont été invité à passer en revue le projet actualisé de recommandations sur la gestion des navires en plastique renforcé de fibres en fin de vie et les solutions autres que l'élimination en mer à la réunion des organes directeurs en 2024, et à en établir le texte définitif, aux fins d'approbation.

Dépôt de matériaux largués pendant le lancement de véhicules spatiaux

Les Réunions ont noté les débats en cours au sein des Groupes scientifiques au sujet du dépôt de matières larguées pendant le lancement de véhicules spatiaux et ont invité les délégations à échanger des renseignements sur cette question lors des futures réunions Les Parties ont été invitées à rendre compte de ces activités et de l'évaluation de leur impact sur le milieu marin, sur une base volontaire, lors des prochaines sessions des Groupes scientifiques. Le Secrétariat a été chargé de poursuivre ses efforts de diffusion de renseignements sur cette question, en particulier avec les organisations régionales pertinentes telles que l'OSPAR, ainsi qu'avec le Bureau des affaires spatiales de l'Organisation des Nations Unies, et de faire rapport selon qu'il conviendrait.

État de la Convention et du Protocole de Londres

Les Réunions ont noté que 87 gouvernements avaient ratifié la Convention ou y avaient adhéré. Compte tenu de l'adhésion récente de l'Iraq en septembre 2023, 54 États avaient désormais ratifié le Protocole de Londres ou y avaient adhéré. Les deux instruments réunis comptaient actuellement 101 Parties au total.

Protocole de Londres/Convention de Londres

L'objectif du Protocole de Londres et de la Convention de Londres est de promouvoir le contrôle effectif de toutes les sources de pollution marine. Les Parties contractantes prennent des mesures efficaces pour prévenir la pollution du milieu marin causée par les immersions en mer. (En savoir plus ici.)

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DÉCLARATION SUR LA GÉO-INGÉNIERIE MARINE 2023

Cette déclaration s'appuie sur les travaux sur la géo-ingénierie marine menés jusqu'à présent par les organismes suivants :

  • les organes directeurs de la Convention de Londres et du Protocole de Londres (y compris leur déclaration à partir d'octobre 2022 ) ;[1]

  • les Groupes scientifiques de la Convention de Londres et du Protocole de Londres (y compris leur déclaration de mars 2023 ) ;[2] et

  • les résolutions adoptées par ces organes sur la géo-ingénierie marine à ce jour (résolutions adoptées en 2008,[3] 2010[4] et 2013[5]), y compris la résolution de 2013 portant adoption de l'amendement au Protocole de Londres pour réglementer les activité de géo-ingénierie marine. 

Les organes directeurs de la Convention de Londres et du Protocole de Londres, conscients de l'approche de précaution décrite à l'article 3 du Protocole de Londres, approuvent les conclusions des Groupes scientifiques selon lesquelles :

  • chacune des quatre techniques de géo-ingénierie marine à évaluer en priorité est susceptible d'avoir des effets délétères étendus, durables ou graves ; et

  • il existe une grande incertitude quant à leurs incidences sur le milieu marin, la santé humaine et les autres utilisations de l'océan.

Les techniques de géo-ingénierie marine comprennent à la fois l'élimination du dioxyde de carbone marin et la gestion du rayonnement solaire. Les quatre techniques évaluées sont l'amélioration de l'alcalinité des océans; la culture de la biomasse aux fins de l'élimination du carbone; l'éclaircissement des nuages marins; et l'amélioration de la surface de l'albédo faisant intervenir des particules réfléchissantes et/ou d'autres matières.

Les Parties à la Convention et au Protocole de Londres continuent d'évaluer les possibilités de mesures appropriées, y compris l'applicabilité des cadres existants [6] de la Convention et du Protocole de Londres et la possibilité d'une nouvelle réglementation.

Les organes directeurs rappellent l'urgence de ces travaux, compte tenu de l'intérêt croissant pour les techniques de géo-ingénierie marine et du nombre et de la diversité des projets de géo-ingénierie marine qui ont été menés, sont en cours ou sont prévus à l'avenir et qui, dans certains cas, sont motivés par des intérêts commerciaux.

En outre, les organes directeurs estiment que ces techniques risquent d'avoir des effets néfastes sur l'environnement, que leur efficacité est mal connue et que, de ce fait, les activités autres que la recherche scientifique légitime devraient être différées. 

Les organes directeurs sont d'avis que les prescriptions énoncées dans le cadre d'évaluation de la recherche scientifique sur la fertilisation des océans [7] et le cadre pour l'évaluation des matières dont le dépôt peut être envisagé en vertu de l'Annexe 4, selon le cas, y compris les critères de légitimité de la recherche, constituent une base appropriée pour l'évaluation des projets de recherche et de développement proposés dans le domaine de la géo-ingénierie marine, et ils encouragent vivement leur mise en œuvre.

En outre, les organes directeurs de la Convention de Londres et du Protocole de Londres encouragent les Parties à la CCNUCC, et à l'Accord de Paris, à la Convention sur la diversité biologique, les signataires de l'accord BBNJ, leurs organes ainsi que d'autres organismes pertinents tels que le PNUE et l'Assemblée des Nations Unies pour l'environnement à prendre en compte les travaux de la Convention et du Protocole de Londres sur la géo-ingénierie marine, dans le cadre de leurs mandats respectifs, notamment pour lutter contre le changement climatique. Les organes directeurs de la Convention de Londres et du Protocole de Londres encouragent également une coopération active avec tous les organismes qui travaillent sur des questions liées directement à la géo-ingénierie marine, et plus largement à la géo-ingénierie.

[1]Comme convenu lors de la quarante-quatrième Réunion consultative des Parties contractantes à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets et de la dix-septième Réunion des Parties contractantes au Protocole de 1996 à la Convention de Londres de 1972. https://www.imo.org/fr/MediaCentre/PressBriefings/pages/Marine-geoengineering.aspx

[2]https://www.imo.org/fr/MediaCentre/Pages/WhatsNew-1854.aspx

[3]LC-LP.1(2008).pdf

[4]LC-LP.2(2010).pdf

[5]LP.4(8).pdf

[6]Les cadres de la Convention et du Protocole de Londres incluent les dispositions des traités, résolutions et documents d'orientation qui sont pertinents à cet égard, y compris ceux mentionnés dans le paragraphe ci-dessus.

[7]https://www.imo.org/en/OurWork/Environment/Pages/AssessmentFramework-default.aspx